Association Française de Zootechnie

French association for animal production

Phosphore digestible pour le porc

Comment calculer la teneur en P digestible apparent d’un aliment pour porcs à partir des valeurs fournies dans les tables INRA-AFZ

Catherine Jondreville, UMR INRA-ENSAR Veau et Porc

Texte également disponible au format PDF

Des valeurs de digestibilité fécale apparente du P des matières premières (dP, à activité phytasique nulle, et dPphy lorsque la phytase endogène est prise en compte) sont introduites dans les tables INRA-AFZ, et une démarche permettant de calculer la teneur en P digestible apparent d’un aliment complet est proposée. Cependant, compte tenu des données fournies dans les tables INRA-AFZ, deux points méritent d’être clarifiés :

  • celui de l’expression de la valeur phosphore des phosphates sur la base de la digestibilité fécale apparente,
  • celui de la prise en compte, lors de la formulation d’un aliment, de l’activité phytasique, selon son origine, végétale ou microbienne, en termes de P digestible apparent.

Digestibilité fécale apparente du P des phosphates

Les tables INRA-AFZ présentent des valeurs biologiques relatives (VBR) avec le phosphate monosodique comme référence. Le calcul de la dP des phosphates à partir de leur VBR consiste à attribuer à la source de référence non pas la valeur 100, mais sa dP, qui est de 90 %.

Par exemple, la dP du phosphate monocalcique peut être calculée comme 92 * 90 / 100, soit 83 %. Le Tableau 1 présente les valeurs de dP pour les phosphates auxquels est attribuée une VBR porc dans les tables INRA-AFZ.

Tableau 1 : Digestibilité fécale apparente du P de différents phosphates
Type de phosphate VBR (%) dP (%)
Phosphate monosodique 100 90
Phosphate bicalcique anhydre 73 66
Phosphate bicalcique hydraté 77 69
Phosphate monocalcique 92 83
Phosphate monobicalcique 83 75
Phosphate monosodique FG 98 88
Phosphate triple Ca, Mg, Na 93 84

Prise en compte de l’activité phytasique dans l’estimation de la teneur en P digestible apparent d’un aliment

Dans les tables INRA-AFZ, nous proposons deux valeurs de digestibilité fécale apparente du P : l’une (dP) correspondant à une matière première dont la phytase endogène est dénaturée et l’autre (dPphy) correspondant à la matière première native. Par exemple, la digestibilité du P du blé tendre est de 30 % lorsque la phytase est dénaturée est de 45 % lorsqu’elle ne l’est pas.

Phytase microbienne

Lorsque l’aliment est granulé, la teneur en P digestible apparent des matières premières doit être calculée à partir de dP et seule l’activité de la phytase microbienne doit être prise en compte. La réponse à l’augmentation de l’activité phytasique dans l’aliment n’est pas linéaire et l’équivalence, en termes de P digestible apparent, de 100 U de phytase supplémentaires diminue lorsque l’activité phytasique de l’aliment augmente (Figure 1). Cette courbe permet de traduire l’apport de phytase microbienne en termes de P digestible apparent, suivant le niveau de supplémentation en phytase. Par exemple, on peut considérer que jusqu’à 500 U, 100 U de phytase microbienne correspondent à 0,15 g de P digestible apparent, soit une équivalence de 0,75 g de P digestible apparent pour 500 U de phytase microbienne. Au-delà, l’efficacité de la phytase microbienne par unité est moindre, et l’équivalence est de 0,040 g de P digestible apparent par 100 U de phytase supplémentaire (Tableau 2). Le nombre d’équivalences peut être multiplié. En formulation, cela revient à introduire autant de phytases microbiennes que d’équivalences. Un exemple avec quatre valeurs est présenté au Tableau 2 et à la Figure 1.

Tableau 2 : Equivalence entre l’addition de phytase microbienne et le P digestible apparent
Incorporation (U / kg d’aliment) g P digestible apparent par 100 U de phytase
Deux valeurs d’équivalence  
0 à 500 0,150
500 à 1000 0,040
Quatre valeurs d’équivalence  
0 à 250 0,196
250 à 500 0,104
500 à 750 0,052
750 à 1000 0,028

 

 Figure 1 : P digestible apparent libéré en fonction de l’activité phytasique d’origine microbienne présente dans l’aliment

phosphore_porc_2

Phytase végétale

La prise en compte de l’activité phytasique des matières premières d’origine végétale ne concerne que les aliments non granulés, puisque les traitements thermiques sont susceptibles de dénaturer en grande partie la phytase végétale. A activité phytasique mesurée in vitro égale, la phytase végétale libère environ deux fois moins de P in vivo que la phytase microbienne, soit une équivalence de 0,08 g de P digestible apparent par 100 U de phytase végétale jusqu’à 500 U (0,4 g de P digestible apparent pour 500 U). Par ailleurs, compte tenu de la variabilité de l’activité phytasique des céréales à paille, il est raisonnable de ne comptabiliser la quantité de P libéré en termes de P digestible apparent qu’en deçà de 500 U de phytase végétale, soit au maximum 0,4 g P digestible apparent / kg aliment. Ainsi, pour obtenir un aliment contenant 2,5 g de P digestible apparent / kg, il faut s’assurer que :

  1. La somme des teneurs en P digestible apparent, calculée à partir de la digestibilité du P à phytase non dénaturée (dPphy) des matières premières, est égale à 2,5 g / kg d’aliment.
  2. La somme des teneurs en P digestible apparent, calculée à partir de la digestibilité du P à phytase dénaturée (dP) des matières premières, excède 2,1 g / kg d’aliment.
Tableau 3 : Valorisation de la phytase végétale – contraintes pour un aliment contenant 2,5 g de P digestible apparent par kilogramme
Présentation Granulé Farine
P digestible apparent, dP (g / kg aliment) 2,5 >2,1
P digestible apparent, dPphy (g / kg aliment) 2,5 2,5

Cela revient à prendre en compte les deux valeurs de digestibilité fécale apparente du P de chacune des matières premières (dP et dPPhy), ces deux valeurs étant égales lorsque la matière première présente une activité phytasique négligeable.